Une bonne manière de découvrir une œuvre c’est aussi de l’écouter.
C’est ce qui nous a été offert dans une Béate comme on aime à la voir!: pleine à craquer. Magali nous a lu Diotime et les lions
d’Henri BAUCHAU, dans un silence recueilli, à peine troublé par le ronflement 
fatigué d’un vieux lion assoupi, entré
dans ce récit par la voie du sommeil. Née dans la Perse antique, au carrefour de l'Orient et de l'Occident, Diotime raconte sa jeunesse, sa révolte, la passion de l'action qui la poussa à transgresser sa condition de femme et les règles de son clan pour participer aux combats rituels avec les lions.
Récit d'initiation, Diotime et les lions est avant tout une histoire de passions humaines. Féminité et amour, révoltes et traditions. À travers la lutte avec les lions, dans l'ivresse du combat et dans la prédilection que lui témoigne son grand-père Cambyse, c'est à la peur, au désir, à la sauvagerie, à la transgression, à la violence de la féminité que Diotime est confrontée. L'histoire de Diotime s'écoute comme une aventure et rayonne comme une parabole.
Dans la Mésopotamie d'autrefois, la chasse, la course à cheval, étaient une affaire d'hommes. Diotime y est donc une princesse extraordinaire,
écartelée entre l'image de son grand-père, haute figure impériale qui chasse les lions, à l'arc, à la lance, (dès l'enfance, l'altier grand-père a promené Diotime sur la croupe de son cheval, il l'a entraînée dans son monde et leur relation est 
une relation privilégiée) et la merveilleuse figure maternelle qui danse et brode dans un jardin d'eau fraîche et d'ombre. Il lui faudra choisir entre la part masculine, sauvage, persane qui l'inscrit dans la lignée de ses ancêtres lions et la part féminine, sage, grecque (celle d’Arsès), qui vibre d'amour en elle dans le sillage de sa mère et de sa sœur.
Ce choix sera déchirement. D'une part, l'épique, les chevauchées, le sang. D'autre part, la douceur, la musique, la danse, la main qui masse, qui panse, qui caresse... Sans rompre l'harmonie, Arsès, chef grec, grand navigateur, trouve sa place dans cet univers où la recherche du bonheur de l'autre prime sur le souci du sien propre. Ainsi, entre les personnages, s'échange une longue série d’accords donnés par amour. ! Celui de la mère Diotime à Arsès, celui d'Arsès au combat pour Diotime, celui de Cambyse à la séparation et à la mort. Diotime reçoit beaucoup de marques d'amour. Il faudra qu'elle aussi apprenne à aimer. La langue du récit est pure, classique, limpide comme une eau de diamant, noble et évidente, sans surcharge.
Remercions Magali qui a su nous offrir l’écoute d’un style, d’une musique, d’une émotion, qui a réussi à trouver l’équivalent vocal du texte écrit, une compréhension de son souffle, de ses courses, de ses suspens et ses silences. Sa voix a distillé le mouvement de la phrase, son tempo particulier, les justes mesures du texte, la pensée d'un auteur.
Diotime et les lions, Henri Bauchau, Actes Sud, 7,90! 